Le digital disparaît du magasin… pour revenir dans les mains du vendeur

On assiste enfin à la reconnaissance du vendeur connecté (applications iPad prise de commandes ou historique client ou stocks ou promos….). Il a désormais pris définitivement le pas sur la tendance  »vendeur muet » (bornes interactives) qui avait comme avantage non négligeable pour le magasin, de ne pas coûter de charges sociales… mais qui n’a jamais pu  motiver le client à la consultation… La tendance avait été poussée très loin puisque certains magasins offraient même un paiement CB sur ces bornes… pensant un peu naïvement que le client se serait déplacé en magasin pour consulter une borne, passer sa commande, la payer et retourner chez lui. Ce n’était pas vraiment sérieux n’est ce pas ??

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Alors que le Retail’s Big Show s’est terminé le 17 janvier, les sessions d’analyse du salon se multiplient. Adobe a ainsi convié ses clients pour échanger sur les grandes tendances de cet évènement, dont les mots clés étaient expérience client et data, avec une vague de « déphygitalisation ». Un point de vue partagé par Christophe Verley, Chief digital officer d’Adeo et Régine Vanheems, consultante.

 

Bien que fini depuis le 17 janvier, le Retail’s Big Show continue de faire de parler de lui et de nombreuses conférences sont organisées pour analyser tout ce qui a été vu sur le salon. A lire d’ailleurs dans LSA cette semaine le dossier complet, du Retail des Hommes. Adobe France, présent chaque année sur le salon, a pris le parti de réunir ses clients et prospects afin de leur faire part des tendances du Retail’s big show, qui devraient rapidement infuser la distribution en Europe.

Cédric Drouot, Senior Client Partner chez Adobe Systems, qui a ouvert cette conférence, souligne qu’il y a une « une accélération avec le mobile, où le consommateur est connecté et en sait bien souvent plus que le vendeur. Cela va de pair avec une explosion des datas. » Le responsable appuie son propos en citant une étude d’IDC Futurescape 2016, qui indique que 50% des ventes du retail sont influencés par le digital, et dans cette part, le mobile pèse 28%.

Le responsable d’Adobe souligne que « tout cela créé plus de challenges pour les enseignes. D’autant qu’il y a un acteur qui force à bouger et que l’on connait tous : Amazon et les pures players en général. Ils n’ont pas moins de défis que les distributeurs traditionnels mais eux n’ont pas tout un historique à gérer. C’est la digitalisation de l’ensemble de l’écosystème qui se révèle complexe. Et plus que la disponibilité d’un produit, son prix, ou sa qualité,  ce qui compte c’est l’expérience client et l’ensemble des échanges qu’une marque a avec ses consommateurs. Le digital n’est qu’un élément de parcours. »

Les pures players très imaginatifs dans le retail US

Pour Christophe Verley, chief digital officer pour ADEO, le Retail’s Big Show est un salon majeur. Le groupe a d’ailleurs envoyé 90 personnes originaires de 9 pays différents. « Ce salon est vraiment très inspirant et nous oriente pour nos transformations à venir, commente le CDO. Le retail se révèle très challengé par Amazon ou Alibaba. Les pures players qui deviennent physiques font des magasins expérientiels impressionnants. Par exemple chez Pirch, qui vend des cuisines et salles de bain, il est possible de prendre rendez-vous pour tester une douche. Et lors de ma visite, quelqu’un cuisinait des cookies et un poulet était en train de cuire au four. »  Autre tendance constaté pour le spécialiste du digital : « les gadgets digitaux ont disparus des magasins et on a vu très peu de bornes interactives. Le vrai digital store c’est le smartphone du client ! »

Par ailleurs, les équipes d’Adeo qui échangeaient régulièrement lors du salon ont salué le retour du vendeur et de la relation vendeur-client au coeur de la préoccupation des enseignes. Pour Christophe Verley, « le digital reste très présent dans le magasin, il devient juste invisible et dédié au vendeur. Par exemple le paiement par le vendeur a été initié par Apple, mais se généralise. C’est un peu compliqué quand on a des gros chariots, mais pouvoir encaisser à un point conseil est un vrai plus. Et il n’y a pas que le paiement : le vendeur peut faire beaucoup de choses, avec une vision sur le stock ou le suivi des commandes par exemple. »

La data reste également une tendance forte sur NRF cette année. « On a vu une multiplication des scénarios possibles mais rien encore dans les magasins, souligne le responsable d’ADEO. Il y a des propositions par les éditeurs mais les distributeurs restent encore trop frileux sur le sujet et l’exploitation de la data se trouve encore trop limitée. Il reste encore à écrire de belle histoire, malgré le sujet Cnil et privacy à gérer. »

Ce n’est pas Adobe qui dira le contraire. L’éditeur génère un chiffre d’affaires de 2 milliards de dollars avec son activité Marketing Cloud, pour un chiffre d’affaires global de 6 milliards de dollars. L’objectif de ce produit consistant à créer un écosystème autour du marketing digital.

Enfin, dernier point pour Christophe Verley : « des solutions de réalité augmentée et virtuelle étaient présentées par des start-ups l’an passé et ces technologies passent maintenant par les grands éditeurs et on les retrouvera peut-être en magasin demain. L’innovation ne se déploie pas si rapidement qu’on pourrait le penser alors qu’en 2016, au même moment, on ne compte plus les nouveautés d’Amazon et des pures players en général qui imposent un rythme fort. On doit tester plus de choses et accélérer. »

Des clients en manquent d’achats mémorables

Pour Régine Vanheems, universitaire et co-fondatrice l’Observatoire du Cross-Canal et du Commerce Connecté, « le mot expérience a été partout, dans les conférences, dans les stands. » Et de citer une étude Deloitte qui juge nécessaire de restaurer le sentiment d’amour avec à peine 47% de clients satisfaits de leur transaction en magasin et 41% clients satisfaits de leur expérience en magasin au niveau émotionnel. « Cela laisse une marge de progression importante, analyse l’universitaire. Mais la grande question est comment s’améliorer ? »

Pour la consultante, trois choses sont à travailler. Ainsi, il faut créer une expérience singulière et mémorable. « Quand le client se souviendra du produit, il se souviendra aussi de la façon dont il l’a acheté. Et si l’achat est mémorable, le consommateur en parlera autour de soi », analyse Régine Vanheems. Sur New York, les exemples en magasins d’une expérience client mémorable ne manquent pas. On peut par exemple citer le flagship Adidas, Rent The Runway ou Dylan’s Candy Bar. Et d’ailleurs si l’expérience est mémorable, le digital est lui très absent… « On assiste à une vague de déphygitalisation où face aux excès du digital, on est à la recherche de l’humain ! », souligne l’universitaire.

Autre axe, gommer les irritants. Sur ce point, l’attente en caisse reste toujours une frustration pour les clients. Sur le salon, les solutions d’encaissement en rayons étaient nombreuses. La consultant a également repéré des outils pour donner des informations produits sans forcément attendre un vendeur. Mais de souligner « on doit rester sur des usages de la technologie simples. On ne va pas juste en magasin acheter un produit, c’est un loisir. »

Vivre une no-expérience

Enfin, pour certains produits, le but est plutôt de limiter l’expérience d’achat. « La no-expérience concerne tous ses produits où on n’a juste pas envie d’avoir une expérience, explique Régine Vanheems. Ce sont les produits corvées, répétitifs… On s’en moque de se souvenir de ces achats et si on s’en souvient c’est que cela s’est mal passé. » Sur NRF, cette no-expérience c’est par exemple le bouton Staples conçu avec IBM, où la commande de fournitures de bureau se fait par voix. Une tendance qui a énormément marqué le CES plus que la NRF, mais n’en reste pas moins prometteuse pour la distribution.

Infograhie La NRF vue par Adobe :

Source : LSA