Transposer les codes du web en magasin ! Ce qui semble être aujourd’hui le Graal des boutiques physiques se heurte à un obstacle de taille, la culture digitale des équipes et le manque d’impulsion donnée par leurs Boss (par désinterêt ou par manque de vision). Cela peut se comprendre ! Comment expliquer à un patron d’hyper, à la tête de son magasin créé dans les années 70 ou 80, commerçant dans l’âme, ayant fait ses preuves, qu’il faut désormais pour fidéliser la clientèle des jeux – comme “LE CRI” sur le site de Cdiscount qui propose aux cyberacheteurs de crier le plus longtemps possible sur leur mobile pour obtenir des bons d‘achats – il faut reconnaitre qu’on peut le comprendre? Non ? Mais la tendance est là, la gamification encouragée par la culture Facebook et la tendance naturel de l’homme s’impose aujourd’hui comme un outil idéal de qualification des bases de données et prend désormais une autre dimension à la lueur des obligations liées à la RGPD.
De Cdiscount à Frichti en passant par Maxi Toys et Ekosport, ces e-commerçants expliquent comment la gamification fidélise les cyberacheteurs, et plus encore.
L’humain est joueur, le cyberacheteur aussi. Certains e-commerçants l’ont bien compris et proposent des mini-jeux sur leur site et application pour gagner des cadeaux et des promotions. « Bandit manchot, puzzle, roue de la chance, tirage au sort, concours photo… Les consommateurs participent autant pour s’amuser que pour la dotation », constate Maxime Blaise, directeur marketing et digital chez Maxi Toys, un spécialiste du jouet qui gère un site e-commerce, près de 180 magasins et tous les mois ce type d’opérations omnicanales.
Même son de cloche chez Cdiscount, le numéro deux du e-commerce en France. « Entre 10 000 et 15 000 personnes jouent quotidiennement à des jeux sur notre appli afin d’obtenir des promotions », explique Pierre-Yves Escarpit, directeur des opérations chez Cdiscount. Ce dernier multiplie les initiatives. Par exemple début mai, son jeu « Le cri » a proposé aux cyberacheteurs de hurler le plus longtemps possible dans leur micro d’ordinateur ou de smartphone afin d’obtenir entre 5 et 500 euros de bons d’achat. Au 7 mai 2018, près de 104 000 joueurs ont participé à ce jeu accessible sur la page d’accueil du site et sur l’appli.
Agrandir sa base de mails
Cette gamification permet avant tout d’agrandir la base de clients du marchand. « En un an et demi, nous avons plus que doublé notre nombre d’abonnés en newsletter, essentiellement grâce aux jeux. Nous mettons toujours en avant ces jeux sur la home page afin de capter du trafic. Une fois sur deux, le visiteur donne son mail pour jouer », assure Geoffroy Mailly, responsable marketing chez Ekosport, un marchand omnicanal spécialiste des sports de montagne et qui vise 32 millions de chiffre d’affaires en ligne cette année. En effet, jouer nécessite seulement à l’internaute de donner son nom, son prénom et son courriel.
« En un an et demi, nous avons plus que doublé notre nombre d’abonnés en newsletter »
La gamification permet donc de faire de l’opt-in, mais aussi de garder plus longtemps le cyberacheteur sur son site afin qu’il y prenne ses habitudes. « En moyenne, le temps passé sur un jeu est de trois minutes trente », ajoute Charles Christory, fondateur d’Adictiz, une plateforme en mode SaaS de jeux marketing qui compte pour clients près de 180 marques dont Kiabi, Boulanger, Bizzbee, Castorama ou Delsey.
Segmenter sa base de mails
Ces jeux offrent également un nouveau levier pour cerner cette base de clients. « En plus de donner son mail, l’internaute peut répondre à quelques questions, à des quiz ou à des sondages qui nous permettent de connaître ses habitudes de consommation : ‘êtes-vous plus ski alpin ou randonnée ?’, par exemple. Entre 60 et 70% des joueurs acceptent de répondre à ce type de questions avant de jouer », assure Geoffroy Mailly de chez Ekosport. Selon plusieurs marchands interrogés, les acheteurs sont plus disposés à donner des informations personnelles dans ce cadre ludique et amusant. Tout cela permet de mieux cibler l’envoi de newsletters selon les profits et d’augmenter les ventes par abonné.
Des partenariats rémunérés permettent d’amortir les frais des plateformes de jeux
« Nous proposons aussi aux marques que nous distribuons de réaliser des jeux concours autour d’un produit. Par exemple, un cyberacheteur jouera dans l’espoir de gagner des skis Salomon. Nous lui proposerons par la suite des promotions autour de cette marque ou de cette thématique », complète Geoffroy Mailly. Ces partenariats rémunérés permettent d’amortir les frais des plateformes qui fournissent des catalogues de jeux aux marchands en mode SaaS comme Adictiz, Kimple, Kontestapp ou encore CibleR. Des services accessibles en général à partir de mille euros par mois. Ici, ce sont les marques qui prennent en charge les dotations.
Fidéliser une communauté
Certains marchands privilégient la gamification afin de fidéliser les cyberacheteurs. Par exemple, Frichti, qui prépare et livre des repas cuisinés à Paris, a lancé un jeu assez difficile sur son application fin 2017. Développé en interne, ce dernier consistait à faire passer dans un passage étroit un personnage sautillant à chaque pression sur l’écran. 25 points obtenus offraient un cookie sur la prochaine commande. Le meilleur joueur de la semaine gagnait aussi un repas gratuit pour quatre personnes. « Ce jeu a si bien marché que nous l’avons maintenu jusqu’à aujourd’hui. Nous comptons plusieurs milliers de gamers, ainsi que des dizaines de milliers de parties jouées. Notre objectif était d’amuser nos clients lors de l’attente de la livraison, mais aussi de l’engager à nouveau sur une prochaine commande », affirme Theodore Mareschal, responsable éditorial chez Frichti.
La cible principale est d’abord les femmes de 29 à 35 ans, les plus joueuses
A noter que « la cible principale est d’abord les femmes de 29 à 35 ans, les plus joueuses. Elles représentent 65% du trafic que nous recrutons pour les marchands », explique Lionel Guichard, fondateur de Kimple, une plateforme en mode SaaS de jeux vidéo marketing, filiale de Sogec (La Poste) et qui compte près de 300 clients dont Carrefour, Brice ou encore La Redoute.
Source : Journal du net